Et si la révision en cours des valeurs locatives des 3,3 millions de locaux professionnels n'allait pas dans le sens d'une plus grande justice fiscale ? Le doute s'est emparé des élus locaux au regard des premières données fournies par l'administration fiscale. Lors de la séance du Comité des finances locales (CFL) du 17 février, pas moins d'une quinzaine d'élus locaux - selon le président André Laignel - ont fait part, durant près d'une heure, de leur inquiétude. Originaires de différentes régions, ils constatent en particulier, dans des proportions certes variables, que la mise en œuvre de la réforme pourrait conduire à revaloriser les valeurs locatives des commerces de centre-ville et, dans le même temps, à réduire celles des grandes surfaces situées en périphérie des villes. Les valeurs locatives des centres médicosociaux pourraient, elles aussi, grimper de manière importante. A Issoudun, ville dont André Laignel est le premier magistrat, elles progresseraient ainsi de 40% du fait de la révision. Ce qui signifie que dès 2016, les contribuables concernés seraient confrontés à une forte évolution de leurs montants d'imposition.
"Si la réforme consiste à enfoncer ceux qui sont en difficulté et à favoriser ceux qui se développent, il faut se poser la question de la réforme", a affirmé André Laignel. "Je ne vois pas qui pourra vendre ça sur le terrain", a-t-il encore estimé. Pour le maire d'Issoudun, si de telles conséquences sont confirmées, il faudra "prendre un peu plus de temps" et "revoir le dossier".
Si les valeurs locatives ne sont "pas pertinentes", il faudra prévoir "d'autres paramètres", selon André Laignel. Il évoque les bénéfices ou le chiffre d'affaires. Arriver à "des valeurs locatives cadastrales justes" reste "un objectif pour lequel nous sommes favorables", a-t-il toutefois rappelé.
A l'unanimité, le CFL a mandaté son président pour qu'il saisisse le Premier ministre dans les jours prochains. Par courrier, il demandera au locataire de Matignon que des simulations des conséquences de la révision des valeurs locatives des locaux commerciaux soient réalisées "commune par commune". Il demandera par ailleurs que les commissions locales et départementales des impôts directs soient obligatoirement saisies avant toute décision de mise en œuvre.
Rappelons que la révision des valeurs locatives des locaux professionnels sera un test pour celle des valeurs locatives des locaux d'habitation, qui concerne, elle, 46 millions de rôles d'imposition. La mise en œuvre de cette réforme qui doit entrer en vigueur en 2018 dépendra notamment des résultats d'une expérimentation qui démarre ce mois-ci dans cinq départements.
La discussion des membres du CFL est intervenue à l'occasion de l'examen d'un projet de décret précisant les modalités de publication et de notification des décisions relatives aux paramètres servant à la détermination des valeurs locatives révisées des locaux professionnels. Lors de la séance, l'instance s'est penchée sur deux autres projets de décret. Le premier de ces textes toilette la réglementation sur les dotations aux collectivités et la péréquation entre les collectivités pour la mettre en conformité avec les évolutions intervenues sur ces sujets dans la loi de finances pour 2015. Un deuxième texte confirme l'attribution de moyens sous forme de crédit de temps syndical aux organisations syndicales membres du Conseil commun de la fonction publique. Le CFL a également été saisi pour avis sur une partie d'un projet de décret portant diverses dispositions d'adaptation de la législation financière dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie. Il a émis un avis favorable sur l'ensemble des projets de décret.
La répartition pour 2014 du produit des amendes de police en matière de circulation routière dressées en 2013 était aussi à l'ordre du jour de l'organisme. Le CFL a entériné un produit qui s'élève à 569 millions d'euros, en diminution de plus de 6%.
Le CFL a par ailleurs rendu certains arbitrages sur la répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF) de 2015, dans les limites qui lui sont accordées. Il a décidé de laisser inchangés pour 2015 les montants de progression de la dotation de solidarité urbaine (180 millions d'euros), de la dotation de solidarité rurale (117 millions d'euros) et de la dotation nationale de péréquation (10 millions d'euros). Ajoutée à l'augmentation de la population, au coût du développement de l'intercommunalité et des communes nouvelles, cette progression de la péréquation représente une contrainte de financement de 257 millions d'euros. Le CFL a choisi de la financer, comme en 2014, par les communes à hauteur de 60% (via un écrêtement de la dotation forfaitaire de 17.200 communes) et par les intercommunalités à hauteur de 40% (au moyen d'un écrêtement uniforme de la compensation "part salaires" de la dotation de compensation des EPCI).
S'agissant de la progression de 117 millions d'euros de la dotation de solidarité rurale, le CFL a prévu de l'affecter pour 30% à la part "bourg-centre", pour 30% à la part "péréquation" et pour 40% à la part "cible".
Lors de la séance, les membres du CFL ont aussi décidé de créer un groupe de travail sur la refonte de la dotation globale de fonctionnement. L'instance adoptera éventuellement, en juillet, les conclusions de ce groupe de travail (voir notre article du 17 février 2015).
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